Depuis que Michael Brown, jeune Afro-Américain de 18 ans, a été
abattu et tué par un agent de police non identifié, samedi dernier
9 août 2014, à Ferguson (Missouri), la majorité noire de la petite ville
située juste à l’extérieur de Saint-Louis a été secouée par des
protestations contre le racisme d’un système qui considère la vie des
jeunes Noirs comme jetable.
La réponse des autorités a consisté à remplir la ville de centaines
de policiers provenant de dizaines de localités voisines – portant des
tenues antiémeute et munis d’armes d’assaut, de chiens d’attaque ainsi
que de véhicules militarisés – pour «contrôler les foules»[1]. Les
manifestant·e·s affirment que le «maintien de l’ordre» est bien la
dernière chose que les flics ont à l’esprit: ces envahisseurs agissent
d’une manière délibérément provocatrice et agressive, ce qui conduit à
une escalade de la violence après plusieurs nuits de protestations.
Mercredi 13 août, aux aurores, peu après que les protestations de la
nuit se sont dispersées, la police tira et blessa gravement un autre
jeune homme de Ferguson. La police déclare qu’ils ont été conduits sur
les lieux parce qu’on leur avait signalé la présence d’hommes portant
des «masques de skieur» et maniant des fusils. Toutefois, lorsqu’ils
arrivèrent sur place, la victime, qui n’a pas été nommée, braqua un
pistolet, les «forçant» à tirer.
Mais la plupart des habitant·e·s de Ferguson – ainsi que des millions
de leurs semblables à travers le pays – ne peuvent s’empêcher d’êtres
sceptiques à propos des affirmations faites par la police à ce sujet.
La présence policière massive à Ferguson, qui ressemble plus à une
armée d’occupation qu’à quoi que ce soit d’autre, est responsable des
tensions et de la violence dans la localité car ils ont réprimé
brutalement les manifestant·e·s durant quatre jours et quatre nuits, en
faisant y compris usage de gaz lacrymogènes et de balles en bois et en
caoutchouc.
Steve Walsh était un passant innocent. Mardi 12 août, alors qu’il
rentrait chez lui pour retrouver son fils de deux mois et la mère de
l’enfant, il se retrouva pris au milieu d’une attaque policière contre
les manifestant·e·s. Ainsi que l’a déclaré Walsh au quotidien
britannique The Guardian, il a été atteint à la nuque par un projectile
en bois qui lui laissa «une blessure sanglante de la taille d’une pièce
de monnaie à l’arrière de son oreille gauche» [2]. Walsh ajouta: «Je me
suis presque évanoui. Le sang commença à couler.»
Les images prises à Ferguson dans la nuit de mercredi montrent un
immense nuage de fumée ou de gaz au-dessus de différentes parties de la
ville [3]. Une autre témoigne de l’utilisation par la police de ce qui
est considéré comme une sorte d’engin incendiaire car on le voit
exploser dans la rue, répandant une pluie massive d’étincelles alentours
[4].
Un auteur du site Jezebel.com [5] décrit ce que l’on voit sur la page
en continu diffusée sur le site internet de la radio KARG Argus
intitulée I Am Mike Brown [6]: «Les spectateurs observent la police
alors qu’elle tire des balles en caoutchouc sur la foule de citoyens
désarmés. Nous voyions comment la police s’approchait d’un groupe de
manifestant·e·s pacifiques. La page I Am Mike Brown rapporte que la
police demandait qu’ils ne filment pas. Le reporter en donne la raison:
“Ils ne veulent pas de témoins.”»
Il n’y a là rien d’étonnant. Au milieu de la violence policière, de
nombreux manifestant·e·s répondent par une action symbolique qui fait
écho de manière émouvante à la façon dont Michael Brown a été tué :
levant les mains en l’air, interpellant la police: «Haut les mains. Ne
tirez pas!» D’autres marches de protestation arborent des panneaux qui
dressent un parallèle avec l’affirmation d’une dignité humaine
élémentaire qui s’était manifestée lors de la lutte pour les droits
civils à seulement quelques heures de voiture plus au sud de Ferguson:
à Memphis, dans le Tennessee: «I am a man», «I am a woman.»
La police de Ferguson émit une déclaration destinée à ceux qui
souhaitent faire des veillées ou manifester, leur «demandant de le faire
uniquement durant les heures de jour, d’une manière organisée et
respectueuse. Nous demandons en outre que tous ceux qui veulent
manifester ou se rassembler de se disperser bien avant la soirée de
telle sorte que la sécurité des participant·e·s ainsi que celle de notre
communauté soient garanties.»
Le fait que la police fasse la leçon aux habitant·e·s de Ferguson –
ou, d’ailleurs, de qui que ce soit – au sujet de la «sécurité» après
avoir abattu un adolescent désarmé et après avoir traité les
manifestant·e·s comme des animaux relève du plus haut degré de
l’hypocrisie. Les flics de Ferguson et les autorités municipales qui
publièrent leurs ordres ne méritent le «respect» de personne, ainsi que
leurs pratiques au cours de la semaine écoulée ne cessent de le montrer.
La police n’a toujours pas révélé le nom de l’agent de police qui a
abattu Michael Brown afin d’éviter des «menaces» à son encontre [ce
vendredi, 15 août, la police a révélé l’identité de l’agent en question,
suspendu depuis le 9 août; la police maintient toutefois sa version des
faits]. Elle a toutefois été très enthousiaste à partager avec les
médias les clichés anthropométriques et les noms des personnes arrêtées
au cours de la semaine sur la charge de «pillage» [8].
C’est là une illustration du racisme qui se love au cœur de
l’irruption de colère à Ferguson : la vie d’un jeune Noir désarmé a été
volée par un agent de police blanc dont l’identité est protégée alors
que les Noirs qui ont prétendument commis des crimes non violents tels
que des cambriolages ont vu leurs noms traînés dans la boue aux
informations du soir.
Malgré la violence de la police, des manifestant·e·s ont contesté
nuit après nuit contre cette double morale. C’est le cas de Jammell
Sapann, un jeune manifestant hurlant à la police qui dispersait une
manifestation: «Tous mes amis ont été tués. J’en ai marre!» [10]
Jeudi matin, on a rapporté qu’Antonio French, un conseiller municipal
de Saint-Louis qui critiquait la police de Ferguson et qui a participé
aux manifestations, au cours desquels, à plusieurs reprises, il a filmé
la police, a été arrêté. Aucune raison n’a été donnée pour justifier
cette arrestation à l’heure où cet article est rédigé. Il ne fait
toutefois aucun doute que l’on tente de le punir pour avoir critiqué la
police.
La crainte des flics face à des voix indépendantes comme celle de
French est bien compréhensible: ils ont pratiqué divers abus afin de
s’assurer que leur récit favori sur les événements est le seul sortant
de Ferguson. Un journaliste écrit qu’au «cours des derniers jours, les
reporters ont été empêchés d’entrer dans la ville. Les journalistes qui
sont toutefois parvenus à y venir ont été accueillis par des gaz
lacrymogènes et menacés par les policiers, au même titre que les
habitants de Ferguson.» [10, 11, 12]
Pour ajouter à ce «couvercle» posé pour empêcher que les informations
sortent de la ville, le 12 août l’Administration fédérale de l’aviation
a déclaré une «zone d’exclusion aérienne» pour les appareils volant à
basse altitude au-dessus de la zone après que l’on eut rapporté que l’on
avait tiré sur un hélicoptère de la police. Ce que cela signifie en
réalité, c’est que les hélicoptères des télévisions ne pourront pas
faire des prises de vue des affrontements entre la police et les
manifestant·e·s.
Dans certains cas, des journalistes se sont vu refuser l’accès des
conférences de presse. Sur Twitter, le prix Pulitzer de journalisme
Trymaine Lee – qui est Noir – indique que le 12 août «on m’a dit de m’en
aller, de retourner à mon logement» [13]. Le jour suivant, deux
journalistes, l’un du Washington Post, l’autre du Huffington Post, qui
mettaient en question les tactiques agressives de la police et filmaient
les policiers, ce qui est un acte protégé par la Constitution, furent
immédiatement arrêtés [14].
Mais si l’on écoute Jon Belmar, le chef de la police du comté de
Saint-Louis, la police a agi en faisant preuve de retenue [jeudi 14 août
au soir, le chef de la police a été remplacé par le gouverneur de
l’Etat ; c’est un Afro-Américain, Ron Johnson, de la police routière, un
Noir originaire de Ferguson, qui a pris le relais ; le but est de
diminuer les tensions et d’effacer les images de véhicules blindés et de
policiers lourdement armés faisant face à des manifestants bras levés,
ce qui se traduit par un style différent: Ron Johnson s’est mis dans le
cortège de tête d’une manifestation en hommage à Mike Brown].
Jon Belmar, selon le St. Louis Post-Dispatch, a dit de ces agents de
police: «Maintenir une telle retenue c’est, franchement,
remarquable.» [15]
[…] La police ne commente pas l’affirmation de Dorian Johnson selon
laquelle les policiers refusèrent d’enregistrer sa déclaration. Freeman
Bosley, l’avocat de Johnson et ancien maire de Saint-Louis, indique
avoir contacté la police pour proposer un entretien avec son client: la
personne qui se trouvait aux côtés de Michael Brown lorsqu’il a été
abattu.
L’avocat a déclaré à la chaîne MSNBC que la police «n’a même pas
voulu lui parler. Ils ne veulent pas connaître les faits. Ce qu’ils
veulent, c’est justifier ce qui s’est produit […]. Ce qu’ils essaient de
faire, c’est justifier ce qui s’est passé au lieu de tenter de
souligner les torts. Quelque chose de mal s’est passé et c’est de cela
qu’il s’agit.»
Dorian Johnson a déclaré à MSNBC qu’il comprenait l’indignation que
ressentaient les manifestant·e·s vis-à-vis de la police: «Il y a deux
foules. Une composée de personnes plus âgées qui veut que justice soit
rendue, mais qui est en colère. Puis il y a une foule plus jeune qui
veut la vengeance, mais il y a là aussi de la colère. Que pouvez-vous
attendre d’autre lorsque quelque chose se passe sans cesse et que cela
blesse la communauté alors que personne ne s’élève contre cela ou fait
quelque chose à ce sujet. Je sens leur colère, je sens leur
dégoût.» [16]
Mais, selon le chef de la police de la ville de Ferguson, Thomas
Jackson, les «troubles» ont été causés par des «agitateurs extérieurs.»
Ce dernier déclara sur le programmeHannity de Fox News [17]: «Il y a
de nombreux agitateurs extérieurs qui sont à l’origine de la violence.
Nous avons eu plusieurs protestations très pacifiques: ils sont fâchés,
ils posent des questions qui exigent des réponses. Je comprends cela.
J’ai reçu le message. Mais la communauté a désormais intensifié ses
exigences une fois que cette violence s’est produite. Nos dirigeants de
la communauté, le clergé, certains activistes, sont allés plus loin et
ont dit “assez c’est assez !”»
Cette tactique – dresser les «bons» manifestant·e·s contre les
mauvais ainsi qu’affirmer que la violence et les destructions de
propriété sont le fait «d’agitateurs extérieurs» – est une méthode
policière et étatique éprouvée. Au cours du mouvement des droits
civiques, les plaintes contre les «agitateurs extérieurs» et les «foules
avides de violence» faisaient partie d’une tentative de diviser pour
mieux régner. C’est ce qu’explique bien Keeanga-Yamahtta Taylor dans un
article du SocialistWorker.org au sujet des rébellions urbaines des
années 1960 [18] :
«Les rébellions sont perçues comme le cousin rétif et désobéissant du
mouvement pacifique et non-violent pour les droits civiques du Sud.
Ainsi, alors que le mouvement des droits civiques est loué de toutes
parts pour son insistance stratégique sur la non-violence, les émeutes
sont universellement condamnées en raison de la violence qu’elles
contiennent. En outre, elles sont aussi considérées comme ayant provoqué
la désaffection des alliés et partisans blancs et sont largement vues
comme étant à l’origine des “politiques de retour de flamme” des
Blancs. [Voir la note explicative en fin d’article: *]
Un éditorial du New York Times, écrit seulement quelques semaines
après les émeutes de Detroit en 1967, file cet argument: «Les émeutes,
au lieu de contribuer au développement d’exigences en faveur du progrès
social et d’effacer la pauvreté, ont eu largement un effet inverse et
ont augmenté les crises en raison du recours aux forces policières et
aux lois pénales.»
Cette perspective ne semble pourtant pas correspondre avec plusieurs
sondages réalisés 10 jours plus tard qui démontrent un soutien massif
pour l’extension des programmes sociaux destinés à atténuer les
privations matérielles que beaucoup voyaient comme la source de la
spirale de violence. Dans un sondage incluant autant des Afro-Américains
que des Blancs, de fortes majorités soutenaient les programmes contre
la pauvreté. Ainsi que le résumait un titre de une du Washington Post:
“Les races sont favorables à l’abolition des ghettos ainsi qu’à la
nécessité d’un programme de type WPA” [Works Projects Administration,
fait référence à la principale agence mise en place dans le cadre du New
Deal qui employa des millions de chômeurs à diverses tâches «d’intérêt
public» – construction ou restauration d’écoles, d’édifices publics,
aménagements des routes, etc.].Quelque 69% des Américains soutenaient
des efforts de l’Etat fédéral en vue de créer des programmes d’emploi et
65% étaient convaincus de la nécessité d’abattre les ghettos. Un autre
60% soutenait un programme fédéral visant à “éliminer les rats” et 57%
soutenaient un programme de camps d’été destiné aux jeunes Noirs.»
Le fait que Ferguson était une poudrière de colère près d’exploser
n’est pas de la responsabilité «d’agitateurs extérieurs» ni de sa
population à majorité afro-américaine. C’est le système raciste qui en
est responsable et, en particulier, les sentinelles de ce système: la
police, responsable de l’assassinat de Michael Brown.
Ferguson est une communauté au sein de laquelle le sceau du racisme
et des inégalités est imprimé sur chaque aspect de la vie, des emplois
en passant par le logement et le «profilage» racial. La localité était
réputée dans le passé comme un havre dans lequel les Noirs qui
cherchaient à quitter la pauvreté et la violence de Saint-Louis – et qui
ne pouvaient vivre dans des quartiers plus aisés en raison des
pratiques de discrimination au logement telles que le redling. Mais
alors que les Noirs déménageaient à Ferguson, les Blancs fuyaient. Un
éditorial du New York Times rapporte [19] :
«En 1980 la ville comprenait 85% de Blancs et 14% de Noirs; en 2010,
la proportion était de 29% de Blancs et 69% de Noirs. Les Noirs,
toutefois, n’obtinrent pas plus de pouvoir politique alors que sa
population croissait. Le maire et le chef de la police sont Blancs tout
comme le sont cinq des six membres du conseil municipal.
L’administration de l’école est composée de six Blancs et d’un Latino.
Comme l’explique Colin Gordon [professeur à l’Université de l’Iowa],
nombre d’habitant·e·s noirs, qui ne disposent pas des ressources leur
permettant d’acquérir une propriété, déménagent d’un appartement à un
autre […]
Les disparités sont encore plus évidentes au sein du département de
police de Ferguson, qui ne compte que trois Noirs sur 53 agents de
police. Si on croit les statistiques réalisées par le procureur général
de l’Etat, les forces de l’ordre largement blanches arrêtent les
habitant·e·s noirs dans une proportion bien au-delà de ce qu’ils
représentent dans la population. Les Noirs représentent 86% des
personnes stoppées lors de contrôles routiers et 93% des personnes
arrêtées dans ce cadre.»
Les habitant·e·s se sont exprimés avec passion pour mettre un visage
humain à ces statistiques. Ainsi que la mère de Michael Brown, Leslie
McSpadden, l’a déclaré, entre deux sanglots, au journaliste de la CNN
Don Lemon [20]: «Le seul fait que mon fils est un Noir de 6 pieds 4
pouces [plus d’un mètre 90] descendant les rues de la ville ne signifie
pas qu’il ait le profil de quelqu’un qui ne descend pas simplement la
rue.»
Le père, Michael Brown Sr., dit lors de la même interview : «Il n’a
pas été rendu justice à mon fils et nous ne sommes pas en paix. S’il ne
reçoit pas justice, nous ne pouvons rester en paix.»
C’est pourquoi il est aussi méprisable de souiller les gens de
Ferguson en prétendant qu’ils se sont lancés dans des «pillages» et des
«émeutes» sans retenue depuis la mort de Michael Brown.
Le plus grand dommage à la propriété a été fait à un commerce de
proximité QuikTip qui a été brûlé puis tagué de graffitis contre la
police. Il est apparu que la foule a probablement retourné sa colère
contre le magasin après que le mot s’est répandu que c’est une personne
du magasin qui a appelé la police pour faire état d’un cas de vol à
l’étalage, ce qui était le prétexte de l’agent de police pour arrêter
Michael Brown. Un Walmart et un local de prêts rapides ont été une autre
cible des manifestant·e·s. Ce sont là des symboles de la pauvreté et de
l’exploitation dans un quartier pauvre.
Jay Nixon, le gouverneur du Missouri, réalisant sans doute que la
réponse brutale des flics n’a fait qu’enflammer la situation, a annoncé
jeudi qu’il allait retirer la police du comté de Saint-Louis de
Ferguson.
Il sera difficile pour la police et les politiciens de faire pire que
ce qu’ils ont déjà fait pour exaspérer les habitant·e·s de Ferguson.
Mais aussi «différente» que puisse être la tonalité de la répression
policière, la colère des manifestations ne changera pas. C’est une
réaction amère aux injustices qui se trouvent au cœur de la mort non
seulement de Michael Brown, mais aussi de celle de John Crawford, un
jeune Noir de 22 ans abattu et tué par un policier au Walmart de
Beavercreek (Ohio) parce qu’il portait un pistolet jouet [21]; celle
d’Ezell Ford, un Noir de 25 ans abattu et tué par la police alors qu’il
était allongé sur le trottoir, obéissant à leurs ordres, à South Los
Angeles [22]; de celle d’Eric Garner, un Noir de 43 ans qui a été
étranglé à mort par un policier sur un trottoir de Staten Island à New
York [23]; de celle de Dante Parker, un Noir de 36 ans qui a reçu des
décharges de Teaser jusqu’à ce qu’il meure à Victorville (Californie)
[24].
Ce ne sont là que les exemples les plus récents de vies de Noirs
volées par un assassinat policier. Au-delà de ces assassinats, un nombre
inconnu de personnes – hommes et femmes – dont les vies ont été
bouleversées par un système d’injustice, raciste en son cœur.
Quelle a été la réponse du premier président noir des Etats-Unis devant cette épidémie de vies volées ? Un silence quasi total.
Le président a exprimé ses condoléances au sujet de l’assassinat de
Michael Brown, le qualifiant de «déchirant». Mais, alors que dans la
nuit de mercredi l’on tirait des gaz lacrymogènes et des balles en
caoutchouc contre les manifestant·e·s et que la police antiémeute
parcourait en tous sens les rues de Ferguson, Eric Schultz, l’adjoint du
secrétaire à la presse de la Maison-Blanche, tweeta depuis Martha’s
Vineyard – où le président passe ses vacances : «Réunion entre amis ce
soir, dans peu de temps. Alerte de coup de vent. Du bon temps pour
tous».
L’échec d’Obama de fournir une initiative politique substantielle
quelconque sur la question brûlante du combat contre le racisme tient au
fait qu’il se consacre au maintien du système qui le produit. Au lieu
de cela, nous devons nous pencher sur l’exemple de ceux qui combattent
le racisme et qui se battent pour que justice soit rendue pour Michael
Brown – ainsi que tous les autres «Michael Brown» du pays dont nous ne
connaissons pas encore les noms.
Faisons comme ces étudiants de première année introduits mercredi à
l’université noire historique, celle de Howard, qui se sont sentis en
devoir de rendre hommage à Michael Brown ainsi qu’aux manifestations qui
se déroulent à Ferguson. En solidarité, des centaines se rassemblèrent
pour une photo puissante: les mains en l’air, le visage défiant [25].
(Article publié le 15 août 2014, sur le
site SocialistWorker.org; traduction A l’Encontre)
Nicole Colson. Publié sur SocialistWorker.org et sur le site d'Alencontre.org
[*] L’auteure fait référence à deux aspects particuliers du mouvement
des droits civiques et de la lutte des Noirs contre le racisme
institutionnalisé, hérité de l’esclavage, aux Etats-Unis au cours de la
seconde moitié des années 1950 jusqu’au début des années 1970. Les
tactiques particulières, dites non-violentes, associées à Martin Luther
King et à son SCLC (Southern Christian Leadership Conference) puis, avec
une évolution sur cette question, le SNCC (Student Non-violent – puis
National –Coordinating Committee) consistait à faire abolir des
discriminations légalisées, qu’il s’agisse de la ségrégation dans les
lieux publics ou des transports publics ainsi qu’à mettre fin à
l’exclusion, par différents moyens, des Noirs des listes électorales et
de certains droits démocratiques. C’est ainsi que ce mouvement prit de
l’ampleur à partir du boycott des autobus de Montgomery, qui dura une
année, en 1955-56 pour culminer dans les grandes lois des droits
civiques de 1964 et 1965.
Les émeutes urbaines commencèrent à éclater dans les villes du Nord
l’été suivant. L’appréciation dominante était que la ségrégation raciale
était propre aux Etats du Sud, archaïsme de la réaction raciste du
début du XXe siècle, alors que le Nord y échappait. Pourtant, les
inégalités sociales et raciales y étaient (et le sont toujours)
profondes, en particulier en matière de logement, d’éducation et
d’emploi. Les stratégies et tactiques de luttes ne pouvaient s’affronter
à un arsenal raciste légalisé qu’il s’agissait d’abolir, car le
mouvement faisait face à des pratiques discriminatoires «insidieuses»,
marquées dans l’espace, dans les politiques d’embauche, etc. C’est l’un
des dilemmes stratégiques que Martin Luther King tenta de résoudre en
déplaçant son action à Chicago en 1966, puis en lançant, avec beaucoup
de difficulté, sa Poor People Campaign, peu avant son assassinat.
Il est impossible de résumer dans une note informative ces questions
centrales, au-delà de ces indications, en particulier les débats
stratégiques différents, l’influence des idées et l’évolution de Malcolm
X, ainsi que l’évolution du contexte international avec la guerre
impérialiste américaine contre le Vietnam. (Réd. A l’Encontre)
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- http://www.buzzfeed.com/tasneemnashrulla/powerful-images-from-ferguson-after-the-death-of-michael
- http://www.theguardian.com/world/2014/aug/12/missouri-police-wooden-bullets-protest-michael-brown
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- http://jezebel.com/ferguson-disgrace-police-fire-on-unarmed-crowds-attac-1621352164?utm_campaign=socialflow_jezebel_facebook&utm_source=jezebel_facebook&utm_medium=socialflow
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- http://www.mediaite.com/tv/michael-brown%E2%80%99s-parents-give-powerful-tearful-first-interview-to-cnn/
- http://www.msnbc.com/msnbc/cops-shoot-and-kill-man-holding-toy-gun-walmart
- http://ktla.com/2014/08/12/man-hospitalized-after-being-shot-by-police-in-south-l-a/
- http://socialistworker.org/2014/07/22/murdered-by-new-york-police
- http://www.vvdailypress.com/article/20140813/NEWS/140819920?sect=Top+Stories&map=12690
- https://twitter.com/The_Blackness48/status/499714499688300545/photo/1
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